Manifestation lundi 22 septembre
Des médecins descendent dans la rue pour Gaza
Pour enrayer l’explosion du nombre de victimes parmi les soignants dans le monde, Medics On The Move For What Matters organise une manifestation devant le Parlement européen le lundi 22 septembre.
Filip Ceulemans

Lors du Congrès sur les soins à Gaza, qui s’est tenu en mai de cette année à Amsterdam, plusieurs médecins ayant travaillé ces derniers mois dans des conditions dramatiques, souvent au péril de leur vie, ont témoigné. C’est là qu’est née l’idée de créer Medics On The Move For What Matters, un mouvement qui entend défendre le respect des droits des soignants tels qu’ils sont notamment inscrits dans la Convention de Genève.
Les Conventions de Genève, signées par tous les pays de l’UE, les États-Unis, Israël et la Palestine, garantissent la protection des civils et des soignants dans les zones de guerre. « En 2025, elles s’avèrent être une lettre morte », déclare le Pr Bart Rijnders (Erasmus MC, Rotterdam), l’un des médecins qui ont porté l’initiative. « Nous voulons le dénoncer, car cela nous concerne directement. »
Soignants tués ou maltraités à travers le monde
Du 1ᵉʳ janvier 2023 au 31 août 2025, 1.985 soignants ont été tués dans des conflits à travers le monde, 420 enlevés et 1.126 arrêtés. Au cours de la même période, 2.267 hôpitaux ou centres de santé ont été endommagés.
À titre de comparaison, durant les dix années allant de 2013 à 2022, « seulement » 1.293 travailleurs de la santé ont perdu la vie, 929 ont été enlevés et 1.272 arrêtés, tandis que 1.676 hôpitaux ou centres de santé étaient endommagés.

« Dans la bande de Gaza, au cours des 22 derniers mois, environ 1.500 soignants ont perdu la vie et encore davantage ont été blessés ; 33 des 36 hôpitaux ont été attaqués et des dizaines de médecins et autres soignants ont été emprisonnés et torturés sans procès », explique Bart Rijnders.
L’armée israélienne ne vise d’ailleurs pas uniquement les soignants à Gaza. Au Sud-Liban et en Cisjordanie, ils sont également souvent la cible d’attaques ciblées. Dans d’autres zones de conflit aussi – Ukraine, Soudan, Est du Congo, Éthiopie, Afghanistan et Myanmar – les soignants et les infrastructures de santé deviennent de plus en plus fréquemment des cibles.
Devoir
« Nous estimons qu’il est de notre devoir de défendre la sécurité de nos collègues et le fonctionnement sûr des établissements de santé en zone de guerre. Cela est indépendant du contenu et du contexte politique du conflit à Gaza. L’action du monde médical devient toutefois d’autant plus urgente lorsque l’Union européenne continue de soutenir logistiquement et militairement des parties belligérantes qui violent délibérément et systématiquement les Conventions de Genève. »
Un relais cycliste des Pays-Bas à Bruxelles a constitué la première action de Medics On The Move For What Matters. « Nous avons été reçus par deux députés européens, mais nous avons vite eu le sentiment que c’était une belle action qui servait surtout à se réconforter soi-même », poursuit Bart Rijnders. « La prochaine action devait être plus ambitieuse. Comme j’ai encore travaillé en Belgique, j’ai pris contact avec Erika Vlieghe, qui avait écrit une tribune remarquée dans De Standaard. »
Soutien international

Sur le site de Medics On The Move For What Matters, le nombre de soignants soutenant l’initiative augmente jour après jour. Début septembre, le compteur affichait près de 2.500 signataires.
« Nous nous réjouissons vivement que les facultés de médecine de toutes les universités flamandes, les hôpitaux universitaires, l’Institut de médecine tropicale et Domus Medica appuient notre initiative. »
Le mouvement dépasse désormais les frontières des Pays-Bas et de la Belgique. Parmi les signataires, on retrouve également plusieurs soignants venus d’Irlande, du Danemark, d’Italie, de Suède, du Royaume-Uni, de Bulgarie, de Turquie, du Brésil, de France, d’Australie, du Canada et des États-Unis.
Protestation sereine
La grande action à laquelle Bart Rijnders faisait allusion est une manifestation que Medics On The Move For What Matters organise le lundi 22 septembre devant le Parlement européen à Bruxelles, en collaboration avec Médecins Sans Frontières, Médecins du Monde et l’Emergency Medical Team Nederland. « Ce sera une protestation sereine. Nous demandons aux soignants manifestants de porter une blouse blanche avec un brassard noir et de ne pas amener de drapeaux », explique Bart Rijnders.
Deux revendications concrètes sont formulées : garantir le droit aux soins de santé (tant pour les recevoir que pour les dispenser) et protéger les soignants, comme le prévoient les Conventions de Genève.
« Si nous ne défendons pas aujourd’hui la sécurité des soignants et des soins en zone de guerre, et si nous acceptons cette nouvelle “norme”, cela mettra aussi en danger, dans notre propre pays, la sécurité de la future génération de professionnels de santé », conclut Bart Rijnders.
Plus d'info : www.medicsonthemoveforwhatmatters.org